La fin du romantisme – les écoles nationales

Cycle 1 – 2 et 3

            Au milieu du 19ème siècle, le romantisme permet aux compositeurs d’exprimer leur patriotisme. L’Europe centrale surtout cherche à s’émanciper de l’influence culturelle très forte de l’Allemagne et de l’Autriche. Aussi, les compositeurs vont puiser leur inspiration dans la musique populaire de leur pays et produire des œuvres exaltant les sentiments nationaux. Ainsi, le « Va pensiero » (1842), chœur des esclaves, tiré de l’opéra Nabucco de Verdi, sera interprété par les italiens comme une métaphore de leur condition par rapport à l’hégémonie autrichienne. Un autre grand compositeur d’opéra, Giacomo Puccini, formera avec lui l’école italienne qui s’inspirera de plus en plus du naturalisme français (Zola, Maupassant), ou du réalisme (Balzac, Stendhal). A la fin du 19ème siècle l’opéra italien puise ses thèmes dans la vie quotidienne : c’est le « Vérisme ».

Peter Nicolai Arbo peint « Valkyries » en 1865

            En Allemagne, Richard Wagner écrit des opéras en s’inspirant de la mythologie germanique. Ses œuvres nécessitent des orchestres de plus en plus fournis, les cuivres prenant de plus en plus d’importance. L’exécution de l’Anneau de Nibelung, ensemble de quatre opéras dure entre 14 et 15 heures ! Il fait construire à Bayreuth un véritable temple dédié à l’exécution de sa musique. Le festival de Bayreuth existe encore de nos jours, on y joue essentiellement les œuvres de Wagner. Avec Anton Bruckner et Gustav Mahler, il formera l’école Allemande qui, bien des années plus tard, enthousiasmera les Nazis qui y chercheront l’exaltation des valeurs allemandes.

            L’école russe est représentée par Alexandre Borodine, Modest Moussorgski, Nicolaï Rimski-Korsakov et dans une moindre mesure Piotr Ilitch Tchaïkovski (qui s’inspirera aussi de thèmes occidentaux). Ils utiliseront beaucoup de mélodies tirées de chants folkloriques. Leur influence, notamment en France, sera considérable. Influence qui perdurera jusqu’au début du 20ème siècle : l’immense Igor Stravinsky choisira Paris pour créer ses célèbres ballets…

            Camille Saint-Saëns, Gabriel Fauré, Erik Satie et surtout Claude Debussy forment l’école Française. Bien qu’influencée par Richard Wagner (comme l’ensemble du monde musical de l’époque) dont elle va très vite chercher à s’émanciper, elle est plus intime, plus poétique et plus délicate. Le centre du monde culturel est alors à Paris, un grand nombre de concerts y sont donnés, les compositeurs français s’imprègnent abondamment des influences musicales étrangères et cherchent à faire le lien avec d’autres domaines artistiques comme la danse ou le théâtre.

            On peut encore citer l’école tchèque, ou encore espagnole, scandinave ou roumaine. Chacune d’entre elles a fortement marqué l’histoire musicale de son pays.

A la mort de son ami le Peintre Viktor Hartmann, Modest Moussorgski visite l’exposition rétrospective qui lui est consacrée. Il en sort bouleversé et se lance dans la composition d’une œuvre pour piano dans laquelle il va chercher à représenter certains des tableaux qu’il a vus. Entre chacun de ces tableaux, il écrira une promenade décrivant l’état dans lequel il se trouve. Les « Douze Tableaux d’une exposition » (qui en réalité ne sont que dix) atteindront la notoriété qu’on connait grâce à l’orchestration qu’en a faite Maurice Ravel en 1922. Baba Yaga (La cabane sur des pattes de poules) est l’avant-dernier tableau. Moussorgski imagine la préparation puis l’envol de la sorcière sur son balai et multiplie les dissonances et les rythmes saccadés qui marquent l’aspect maléfique de la créature.

Une écoute : La cabane sur des pattes de poule (Baba Yaga) de Modest Moussorgski

https://www.youtube.com/watch?v=ACfd-o7FFP0

Objectifs de connaissances :

Dans la seconde moitié du 19ème siècle, les compositeurs expriment leurs sentiments patriotiques (l’amour de leur pays) par la musique. Dans beaucoup de pays se forment des « écoles nationales ». En France, c’est Claude Debussy qui en est le chef de file.

En Russie, le compositeur Modest Moussorgski compose « Les douze tableaux d’une exposition » en 1874.

Compétences cycle 1 :

Parler d’un extrait musical et exprimer son ressenti ou sa compréhension en utilisant un vocabulaire adapté.

Compétences cycle 2 :

Exprimer sa sensibilité et exercer son esprit critique tout en respectant les gouts et les points de vue de chacun.

Connaitre et mettre en œuvre les conditions d’une écoute attentive et précise.

Compétences cycle 3 :

Développer sa sensibilité, son esprit critique et s’enrichir de la diversité des goûts personnels et des esthétiques.

Cycle 1 : Encore une fois, c’est en salle de motricité qu’on proposera la première écoute. On donnera deux foulards par élève et on leur demandera de se déplacer dans la salle en faisant danser ceux-ci sur la musique.

L’objectif est de leur faire prendre conscience du côté saccadé et difficilement prévisible de certains passages, des envolées et des moments calmes.

Il sera important de les faire verbaliser sur l’activité afin de passer de la mémoire à court terme (sensorielle) à une mémoire à plus long terme.

L’œuvre pourra bien entendu être réécoutée plusieurs fois, juste pour le plaisir ou pour travailler une chorégraphie. Cette phase de réécoute est essentielle car non seulement, elle apporte du plaisir, mais elle permet aussi de réactiver les effets de la situation d’apprentissage.

Cycle 2 et 3 : Il n’est pas pertinent de montrer la vidéo. La première écoute pourra s’effectuer en salle de sport (ou de motricité). On donne aux élèves quatre verbes (écrits et visibles de tous en continuité) : grimper, ruser, fuir et sauter (on peut en proposer des différents, mais pas plus de quatre).

On place les élèves par groupe de quatre et on leur demande de construire une chorégraphie dans laquelle ils s’appuieront à la fois sur les verbes et sur la musique.

L’enseignant laisse la musique en continu et passe dans les groupes pour encourager, aider, construire…

On regardera chaque chorégraphie avec bienveillance.

Lors d’une autre séance, dans la classe, on réécoutera l’extrait et on demandera aux élèves de s’exprimer librement oralement : « qu’avez-vous envie de dire sur ce que vous venez d’entendre ? »

L’enseignant restera en retrait des échanges en évitant de donner son avis. Il veillera juste à la clarté du débat et à l’argumentation.

Il est essentiel que les élèves comprennent que, certes Moussorgski souhaite décrire une scène liée à une sorcière, Baba Yaga et à sa maison sur des pattes de poule, mais que cette musique pourrait décrire bien d’autres choses ! Personne ne pouvait deviner de quoi il s’agissait. Moussorgski lui-même imagine une sorcière, sans trop savoir ce qu’elle manigance…

Le jeu qui consisterait à deviner ce que représentent les autres tableaux risque d’avoir des effets négatifs sur l’appréhension de l’œuvre par les élèves.

Par ailleurs, il est tout à fait intéressant de proposer une écoute comparée avec l’œuvre originale pour piano (l’orchestration a été faite par Ravel en 1922).

https://www.youtube.com/watch?v=NSio2Bg-kUQ

Pour aller plus loin :

Charles Gounod : Marche funèbre d’une marionnette

Fuyant l’invasion allemande, le compositeur français Charles Gounod s’installe en Angleterre en 1870. Il tente d’y faire jouer sa musique, aidé en cela par sa maitresse, Geogina Weldon et le célèbre critique anglais Henri Chorley qui traduit ses textes. Mais Gounod n’apprécie pas du tout l’individu qu’il trouve prétentieux et méchant. Il écrit une petite pièce satyrique pour piano pour se moquer du vieil homme. Mais celui-ci meurt avant que l’œuvre ne soit jouée. Gounod ne peut plus dédier cette œuvre à Chorley ! Il la rebaptise ironiquement « Marche funèbre d’une marionnette » et en réalise une orchestration 9 ans plus tard. Outre le thème principal qui deviendra plus de 70 ans plus tard le générique de la célèbre série « Alfred Hitchcock présente », on y reconnait (vers 1’53) le thème de la chanson « Polichinelle ».

https://www.youtube.com/watch?v=0pOXhAF7L0I

Johannes Brahms : Danse hongroise n° 5 (Reprise par La Horde)

Bien qu’il soit allemand, Brahms s’intéresse très tôt à la musique tzigane. Il écrit 21 danses hongroises pour piano à quatre mains entre 1867 et 1880. Ces danses sont largement inspirées de mélodies populaires hongroises. Brahms en orchestrera quelques-unes lui-même, les autres le seront par Albert Parlow ou encore le célèbre Anton Dvorak. La version proposée ci-dessous est un peu… décalée.

https://www.youtube.com/watch?v=TTxbZIETDZg

Autre extrait des douze tableaux d’une exposition : Gnomus

Personnage inquiet et inquiétant, gardien de la forêt, Gnomus (une sorte de petit monstre) est le deuxième tableau de la série.

https://www.youtube.com/watch?v=2T_aY52jMMY

Gabriel Fauré : Cantique de Jean Racine

Il s’agit d’une œuvre de jeunesse du compositeur français Gabriel Fauré, écrite sur un texte (d’inspiration religieuse) de Jean Racine, l’un des plus grands dramaturges français du 17ème siècle (Phèdre, Andromaque, Bérénice, Britannicus…).

https://www.youtube.com/watch?v=NzUMfVpugq4

Nabucco de Verdi : Va pensiero (chœur des esclaves)

Verdi, écrit « Nabucco » en 1842 alors qu’une partie de l’Italie est sous domination autrichienne. Il s’agit d’un hymne à l’indépendance, avec le chœur des esclaves comme point culminant.

En 2011, Ricardo Muti dirige une représentation devant Silvio Berlusconi, président du conseil de l’époque qui multiplie les coupes budgétaires dans le domaine de la culture. A la fin de Va pensiero, il adresse un message d’alerte au public concernant ces décisions politiques et accepte de livrer un bis (ce qui ne se fait jamais) en invitant le public à chanter avec le chœur… A regarder jusqu’au bout !

https://www.youtube.com/watch?v=xRi4_ne0VYM